Nombreux sont sans doute les utilisateurs qui, à l’instar de Mr Jourdain qui faisait de la prose sans le savoir, emploient parfois quotidiennement des logiciels libres (Firefox, VLC, Libre Office) sans le savoir… Mais quelle est la valeur de cette utilisation sans conscience ? La conscientisation de ces usages, et de leurs significations éminemment politiques, est fondamentale pour développer chez tous·tes une culture numérique faite de connaissances en action mais aussi d’une vision du monde et de son rapport aux autres.(1)
(1) BALTZ Claude (1998). Une culture pour la société de l’information ? Position théorique, définition, enjeux. Documentaliste-Sciences de l’information, vol.5, n°2, p. 75-82 – Cité sur cultinfo.hypotheses.org/971
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“Parce que l’école a une mission sociale – depuis la maternelle jusqu’à l’université et dans la formation continue – de former des citoyens d’une société forte, capable, indépendante, solidaire et libre” – Richard M. Stallman, 2018 – Le libre comme alternative pour l’école contemporaine ? Hermès – La Revue, N°78, P.108. – Cité sur cultinfo.hypotheses.org/971
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C’est donc avec la volonté de promouvoir les « biens communs numériques » et peut-être tenter d’insuffler ce noble objectif d’une utilisation des logiciels libres « en conscience » dans le cadre de l’éducation et de l’école, que plusieurs associations qui promeuvent le libre en Belgique francophone se sont mobilisées pour proposer une version française d’un manifeste qui avait été publié en mai 2022 aux Pays-Bas. Car comme l’expriment avec beaucoup de justesse Anne Cordier et Sophie Bocquet dans l’article « Richard Stallman. Pour une culture numérique humaniste. » publié en juillet 2021 sur cultinfo.hypotheses.org/971, il s’agit fondamentalement de faire un choix qui anticipe les incohérences du logiciel privateur et celui de la soumission des élèves à des logiques économiques qui conditionnent leurs pratiques, actuelles et futures.
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[…] cette revendication du choix nous semble impérieuse pour exercer nos libertés, individuelles et collectives, mais aussi tout simplement et fondamentalement notre mission : favoriser l’émancipation, culturelle et critique, de nos publics. Offrons le choix à nos élèves, battons-nous pour leur permettre d’avoir une vision plus exhaustive du paysage numérique, ne les vendons pas aux entreprises numériques sous prétexte que Zoom fonctionne mieux que la solution proposée par le Ministère. N’allons pas vers la facilité, le gain de temps, en vendant les données personnelles de nos élèves !
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Pourquoi ? Parce que nous, une coalition de parents, de professionnels de l’informatique, d’enseignants, de défenseurs de la vie privée, nous constatons que le système éducatif numérique actuel est dominé par les géants de la technologie et que les droits fondamentaux – comme la vie privée des enfants, des parents et des éducateurs – ne sont pas suffisamment garantis. C’est pourquoi nous demandons une conception alternative des systèmes éducatifs numériques dans laquelle les valeurs publiques et l’autonomie de l’individu peuvent être garanties. Et nous appelons les organisations, les associations et toutes les personnes sensibles à ces questions à nous rejoindre et à soutenir le manifeste via la pétition qui l’accompagne.
Pourquoi mobiliser au-delà des frontières de la Fédération Wallonie-Bruxelles qui est compétente pour l’enseignement francophone belge ? Parce que les questions du numérique et du choix des outils dépassent de loin le cadre strict des frontières d’une communauté territoriale. Parce qu’ici nous sommes confrontés à la puissance des géants de la technologie et qu’ils déploient de gros moyens – notamment en lobbying au niveau des états et de l’Europe – pour insidieusement s’imposer dans nos systèmes éducatifs en « offrant » leurs services pour « soulager » l’école et ses budgets étriqués… Et parce que tout ceci est la marque indéniable de « la capacité d’influence démesurée dont disposent désormais les géants des technologies numériques, qui se sont constitué un monopole sur les espaces publics eux-mêmes, les lieux où circulent les faits et naissent les idées ».(2)
(2) La Machine est ton seigneur et ton maître, Postface de Celia Izoard, Agone, mai 2022, P. 97.
C’est pourquoi nous faisons appel à la « convergence des luttes », afin que les libristes et autres défenseurs de la vie privée, d’ici et d’ailleurs, s’unissent pour faire entendre leur voix et revendiquent avec conviction l’utilisation de solutions éthiques et libres, alternatives à celles proposées – devrions nous déjà dire imposées ? – par les multinationales que sont GAFAM et consorts. Car ces solutions existent et sont portées par les sociétés de services en logiciels libres [SSLL], et que le retour à une forme de « souveraineté technologique » du numérique et à l’indépendance qu’elle procure, ne pourra vraisemblablement se faire qu’en s’appuyant sur des acteurs locaux avec lesquels on « cultive les rapports humains », pour que les outils s’adaptent aux besoins des utilisateurs et non l’inverse !
SSLL ⇒ https://fr.wikipedia.org/wiki/Entreprise_du_numérique_libre
Merci à l’ADULLACT qui a déjà marqué son soutien au manifeste, que chacun.e peut soutenir en signant la pétition disponible sur educode.be/manifeste, que ce soit titre individuel, ou mieux, de celui de votre organisation. Merci d’avance pour la diffusion du manifeste auprès de vos réseaux et contacts.
⇒ https://educode.be/manifeste
Erick Mascart, Educode asbl, le 13/09/2023