Mercredi, le collectif EduNathon publiait un communiqué de presse relatif à l'audience du 8 septembre dernier au Tribunal de Grande Instance de Paris. Le collectif dénonce ainsi le recours des multinationales au "mécénat" pour financer le numérique à l'école. Une question épineuse auquel le TGI a répondu hier.
"La principale question qui est posée au Tribunal est de savoir s’il est possible en France qu’une multinationale et un ministère s’exonèrent du droit des marchés publics et de la concurrence en décidant de passer un accord de 13 millions d’euros de « mécénat », souligne EduNathon dans ce communiqué.
Pour mémoire, un mécénat est un soutien financier ou matériel réalisé dans l’intérêt général, et sans contrepartie. Il donne lieu à des déductions fiscales.
Or, qui oserait penser aujourd’hui, que les acteurs de ce « partenariat » sont désintéressés ? En équipant des milliers d’établissements publics, en formant des milliers de collaborateurs, Microsoft s’assure que les élèves des écoles françaises s’habituent à utiliser ses produits, et deviennent, par la suite des utilisateurs payants de leurs services. Il n’y a aucune générosité gratuite dans ce geste de la part d’une entreprise qui déploie des efforts conséquents depuis des années pour pénétrer le marché de l’éducation.
Pendant que ce partenariat de « mécénat » perdure, des entreprises et leurs emplois disparaissent faute de pouvoir accéder à la commande publique ou d’avoir les poches suffisamment pleines pour pouvoir fournir leurs services gratuitement comme le propose Microsoft.
Par ailleurs, l’audience a semblé montrer que rien n’avait été fait en ce qui concerne les données personnelles des enfants, professeurs, chercheurs, étudiants – alors que ce devait être le premier point de ce partenariat."
En réponse à toutes ces interrogations, le Tribunal de Grande Instance a fait paraître son avis, ce jeudi 15 septembre. Le Tribunal a fait valoir un défaut de condition d'urgence, concernant la demande de suspension de l'accord en référé.
"En clair, dans une telle procédure, si urgence il y avait, les associations auraient dû agir immédiatement à sa porte, et surtout ne pas perdre un temps précieux auprès du ministère avec une procédure administrative inutile." résume NextInpact. De son côté, EduNathon a justifié le caractère urgent de la situation par l'imminence de la rentrée scolaire, et donc la mise en oeuvre du partenariat dans des établissements scolaires. Argument qui n'a pas prévalu aux yeux du Tribunal.
D'autres points ont été examinés, notamment le "caractère illicite" du partenariat, qui n'a pas été retenu compte tenu que l'accord ne mentionne aucun coût caché, aucune obligation d'installation, et reste limité dans le temps (dix-huit mois). L'intégralité de l'ordonnance du Tribunal est disponible sur NextInpact.
Les associations et entreprises du collectif EduNathon ont donc été déboutées, et condamnées à payer 2500€ à chacune des parties adverses, au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Ce verdict est bien entendu très décevant pour la sphère libriste, mais également pour le monde enseignant (fortement mobilisé) et les entreprises françaises du numérique. Si la bataille juridique a échoué, les associations derrière EduNathon semblent avoir gagné la bataille de l'opinion, grâce à l'indignation, plus forte que jamais, suscitée par cette affaire.
Voir le communiqué du Collectif : Communiqué de presse du 14 septembre 2016 via le site EduNathon
Lire l'article : Rejet du recours contre le partenariat entre Microsoft et le ministère de l'Éducation nationale via NextInpact
Lire aussi : Logiciels libres et administrations: l'impossible mariage ? via France Inter
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